Ces dernières années, on ne compte plus vos confrères mis en examen à
Lyon, Saint Etienne ou Bourg en Bresse. Les CP constituent-ils une
profession plus malhonnête qu'une autre ?
Effectivement, la presse s'est fait
l'écho de quelques petits soucis qu'on eu certains de mes confrères à
Saint Etienne, à Lyon, avec des objets du culte, par exemple, mais
apparemment il y a eu un non lieu, on n'en a plus parlé.
Maître Leseuil a été radié...
Oui, mais pour Leseuil
je me demande si ça ne relève pas un peu
de la psychiatrie ! Tout le monde lui a dit « mais vas-y, paie » etc, et
non... Pour autant que je connaisse le dossier, je ne dirais pas qu'il a été
malhonnête, mais qu'il a disjoncté !
Vous-même, avez-vous déjà eu affaire à la
justice ?
Bien, comme tout le monde... (Rires)
C'est une réponse à la lyonnaise...
Si, si, si, à un moment j'ai eu des soucis, puis c'est tombé... on n'avait
rien à me reprocher ; des objets qui m'avaient été confiés, pas
directement par le propriétaire mais par l'intermédiaire qui encaissait
les sommes et oubliait de les donner au propriétaire. J'ai été entendu en
tant que témoin pour fournir ces explications, je les ai données. De tels
problèmes sont inhérents au métier : un jour j'ai vendu un tableau
d'Utrillo, et j'ai vu débarquer un commissaire de police. Le détenteur du
droit moral a fait saisir en disant que ce tableau était faux, bon, et
bien moi j'avais un certificat de l'expert et la justice est intervenue
là-dessus.
De nombreuses uvres d'art quittent la France par le biais de vos
études. N'avez-vous pas parfois le sentiment d'être complice de la
dispersion du patrimoine national ?
Complice involontaire, je le regrette profondément, mais je dois dire
qu'aujourd'hui la France est devenue un grenier qui se vide... Mais je me
demande si la législation, en France, n'est pas responsable, parce qu'il
ne faut pas oublier que le système de taxation que l'on impose à des
acheteurs et à des vendeurs en France, ne se retrouvant pas dans les
autres pays de la Communauté Européenne, les gens vont là où ils savent
qu'ils n'auront pas toutes ces contraintes.
Avez-vous quelques scrupules à avoir fait fortune sur la dispersion du
patrimoine national ?
Il faut savoir qu'il y a une législation qui protège certains objets,
vous ne pouvez pas exporter sans avoir des autorisations. Des tableaux,
des objets d'art, ça peut être des objets qui peuvent faire partie du
patrimoine national, qui sont protégés, qui peuvent être négociés et
vendus librement aux enchères publiques mais qui n'auront pas
l'autorisation de sortir du territoire national, puis il y a ceux que
l'Etat préempte et ceux dont l'Etat pense qu'il y en a suffisamment et
qu'on peut laisser partir. Le problème effectivement c'est qu'il y a une
richesse patrimoniale qui fout le camp et ça me navre parce qu'il y a des
acheteurs en France, mais qui ne veulent pas et n'osent pas acheter en
France. Les impôts ceci, les assurances cela, les taxes... Vous achetez un
bel appartement et d'un seul coup vous vous retrouvez à devoir payer l'
impôt sur la fortune, etc, alors que vous l'avez acheté avec votre argent,
normalement, en faisant des emprunts. On vous fait payer des impôts sur de
l'impôt. Et puis il y a le dynamisme des maisons étrangères, dynamisme qui
est facilité par la législation française qui pénalise. Les gens ont tout
intérêt à faire quitter leurs produits pour aller les vendre à Monaco, en
Angleterre. C'est dramatique. La petite boutade que je vous dirais, c'est
que je trouve qu'il y a plus de meubles d'époque aujourd'hui que sous
Louis XVI, si Louis XVI revenait sur terre il serait un peu estomaqué par
le nombre de meubles d'époque. (Rires)
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