Vous avez parlé de délit de sale gueule. Soupçonneriez-vous Michel Noir
d'antisémitisme ?
A priori, je ne le crois pas puisque son
fonds de commerce était les résistants, les déportés et la communauté
juive sur laquelle il s'est beaucoup appuyé. Son excellent ancien gendre,
Pierre Botton, m'avait dit : « On a appris dans des cours d'art
dramatique à se faire pleurer Michel et moi. »
Vous avez tout perdu dans cette affaire, votre joie de vivre, votre
jeunesse ?
Oui, ça a été très lourd à porter...
Mais tel le phénix, trois ans plus tard, vous ressucitez en mettant la main sur les
Petites Affiches Lyonnaises. Combien les avez-vous achetées et avec quel
argent ?
Je n'ai acheté ça aux dépens de
personne. Il y avait 14 candidats à la reprise et je n'ai aucun mérite,
c'est moi qui ai offert le plus. Les Petites Affiches Lyonnaises ont été
payées 30 millions de francs.
Vous étiez en quasi-faillite à l'époque, comment avez-vous payé ?
Les Petites Affiches Lyonnaises ont été
payées 30 MF, avec l'aide de la Banque Populaire, de Martin Maurel, de la
Lyonnaise de Banque et de la BNP. Tous est vérifiable et les gens sont en
place. J'ai dû apporter moi, de mes deniers, 4 MF en hypothéquant ma
maison. J'ai eu, ce qui est très agréable à constater, une confiance
totale des banques. Pendant trois ans, je n'ai pas pris de salaire et je
n'ai pas pu rembourser aussi régulièrement qu'il le fallait les banques.
Et il y a des gens, par exemple, comme mon ancien collaborateur Alain
Milliat, qui disaient : « Vous êtes fou, on ne va jamais y arriver ! ».
C'est vrai que ce n'était pas évident parce que les frères Matagrin -
pendant toute la période où le journal appartenait au Progrès, qu'il était
mis en sommeil - avaient fait leur boulot. Ils étaient Lyonnais,
professionnels, sérieux, ils avançaient, il n'y avait rien devant. Quand
j'ai racheté, le journal faisait 11,3 millions, et Jacques faisait 24 et
quelques millions. On a rattrapé Jacques il y a quatre ans. Au bilan 2002,
on doit faire 28 millions et lui 26 millions.
En dix ans, vous avez considérablement développé le titre et ses
satellites. De quoi réaliser une juteuse plus-value en le revendant à
Georges Labet ?
A Georges Labet
et Michel
Guyomar. J'ai revendu les Affiches
environ le double du prix d'achat.
Pourquoi avoir refusé l'offre de votre ex-directeur général Alain Milliat ?
Qui, du coup, est parti danser à la concurrence !
Il était déjà engagé à la concurrence au
cas où vous ne le sauriez pas parce que quand Alain Milliat dit que c'est
à conditions égales, c'est vrai, c'est égal mais il manquait 8 millions.
Laisser partir votre entreprise dans des mains inconnues alors que vous
avez votre directeur général qui tape à la porte c'est incompréhensible.
C'est incompréhensible pour les imbéciles. Mais pour les gens normaux
c'est compréhensible, je vais vous dire pourquoi. Pendant dix ans, Alain
Milliat m'a dit : « Je ne veux pas être numéro un, je veux être numéro
deux, moi j'aime bien être exécutant ! ». C'est moi qui ai monté un
tour de table pour Alain. Vous connaissez ma relation avec Sophie Desforey.
On est ami depuis quinze avec elle, ses enfants et son mari. Donc j'ai dit
à Sophie « Est-ce que tu reprends mon affaire ? » « Avec Alain,
oui ». Elle connaît bien Alain. L'idée la meilleure a été de faire
participer Jean-Claude Cellard, PDG des Affiches de Grenoble. Donc on
l'appelle. Le tour de table se monte et Alain me dit : « Non, c'est
trop cher ! », parce que moi en plus j'ai joué le jeu jusqu'à sa
« trahison », j'ai montré à Alain le compromis écrit que m'a envoyé
Guyomar et que je n'ai pas signé la
première fois. Il avait donc toutes les données en mains mais il a laissé
tomber l'affaire.
Suite de l'interview
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