Revenons-en à cette rupture de contrat. Certains ont pensé à des
malversations de votre part...
En effet, des gens que je fréquentais me
disaient : « Fernand, on ne te demande pas de nous faire des
confidences mais pour que Michel Noir rompe le contrat aussi brutalement,
c'est qu'il a dû découvrir des trucs que tu as fait avec Francisque
Collomb » et c'est pour ça que c'est moi qui ai demandé les
expertises. J'étais parrain de la petite fille de Francisque Collomb donc
les mecs pensaient qu'il y avait magouilles et compagnie. Ils m'ont fait
chier pire que le contrôle fiscal. Cela a duré six mois. On ne pouvait
plus travailler. Je crois qu'ils ont trouvé une erreur, c'était deux
centimes.
Racontez-nous votre mise à mort !
Je reçois un coup de téléphone à 19h de
Bernard Sarroca : « Le grand voudrait te voir. Tout de suite, ne
déconne pas, il a un dîner, viens dès que tu peux ! ». Je suis arrivé
à 20h15. Noir m'a reçu. Il a sorti le grand jeu, il s'est assis à côté de
moi et en face il y avait Sarroca et son directeur de cabinet qui
s'appelait Lebuy. Quand il me regardait il me faisait peur. Cela a été ma
mise à mort à tel point que je me suis dis : « De toutes façons je suis
foutu, j'ai tout perdu, je vais être arrogant, il ne me reste que ça ! ».
Noir conclut avec une gentillesse et une douceur mielleuse : « Monsieur
Galula, vous avez compris que nous ne pouvons pas travailler ensemble.
Alors qu'avez-vous décidé ? ». Je lui réponds : « Mais je n'ai
aucune proposition de votre part. Je décide quoi ? » « Puisque nous
ne pouvons plus travailler ensemble, je vous ai préparé deux courriers »
et il me sort deux lettres tapées à la machine, de la mairie bien sûr, il
y avait marqué SEDIP en haut et je disais globalement, interprété par
Monsieur Noir ou ses conseils « Je vous demande de ma propre initiative et
sans aucune demande ni pression de bien vouloir annuler, dès réception de
ce courrier, le contrat de telle date qui me lie à la ville de Lyon ».
Il vous demandait de signer votre démission avec entête de votre société ?
Mon suicide économique oui. Il me
donnait un modèle à signer et je lui dis : « Vous voulez que je signe
ça ? Mais Monsieur, c'est un suicide économique ! » Il me
répond : « Mais vous n'avez de comptes à rendre à personne, vous êtes
le seul patron chez vous » « Attendez mais j'ai 48 salariés, je
fais quoi ? » « Je ne crois pas vraiment que vous ayez le choix ! »
Là, j'ai fait un peu théâtral et je prends les deux lettres, il me dit « C'est
pour les signer et me les rapporter demain ? ». Je lui réponds : « Non,
c'est pour les donner aux journalistes qui m'attendent ». Aucun
journaliste ne m'attendait. « Je n'ai rien contre vous Monsieur Galula,
je vais vous dire un truc, vous êtes certainement le meilleur
professionnel que je connaisse » « Je ne vous en demandais pas tant
Monsieur le maire. Mais alors pourquoi vous ne voulez plus travailler avec
moi ? » « Monsieur Galula, vous êtes très intelligent, vous
comprenez ? » Je suis très intelligent mais là je n'ai rien compris. A
ce jour je n'ai jamais eu de réponse du principal intéressé mais personne
n'en a eu...
Si vous aviez versé un dessous de table, auriez-vous pu vous en sortir ?
Botton en était friand à cette époque. Vous ne lui avez pas proposé un
dessous de table pour sauver votre tête ?
Les dessous de table je les connais.
Qu'est-ce que je peux proposer sur un marché d'édition qui fait 15 MF et
où j'ai 25% de marge. Qu'est-ce que je vais donner ? Deux millions, trois
millions ? Ils ne se sont jamais contentés de sommes pareilles. Ce que
vous ne voulez pas comprendre c'est qu'il y avait un vrai délit de sale
gueule. C'est ce que nous avons plaidé en toutes lettres.
Il n'était intéressé que par l'argent ?
Pas à cette échelle là. Quand le juge
Courroye m'a dit : « J'ai réussi à reconstituer 115 MF en Suisse »,
je lui ai dit « Mais Philippe, vous êtes un gamin. Moi à moins de 250
millions, je ne signe pas » et je sais pourquoi, il suffit de voir le
quai Achille Lignon, TEO... Quand on sait que du temps de Monsieur Pradel,
on donnait 1,5 ou 2% pour les partis politiques même si c'était pas
interdit d'en profiter un peu, lui il a semble t'il placé la barre
beaucoup plus haute. On a parlé de 5 à 7% lors de leur procès.
Est-ce qu'il vous a fait une proposition de cet ordre là ?
Jamais parce que je l'aurais acceptée.
J'ai viré 36 personnes en six mois mais mon orgueil c'est que j'ai touché
11 millions et demi d'indemnités.
Suite de l'interview
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