Par la même occasion vous faites la connaissance de la maman de Jean, la
fameuse Mère Vittet. Quelle genre de femme était-elle ?
Chez la mère Vittet, c'était la relation avec le client qui
était fabuleuse. Et puis, le personnage était attachant. C'était une
maîtresse femme d'un autre temps. Derrière sa caisse là... Je fermais rue
Victor Hugo à 2 heures du matin, j'arrivais chez la mère Vittet qui à
l'époque était ouverte non-stop, 24H/24H. Je passais parfois une heure
avec elle. Elle était touchante, émouvante, bosseuse...
C'était mythique pratiquement ?
J'avais fait ma journée de douze, quinze, dix-huit heures,
j'arrivais chez la mère Vittet parce qu'à l'époque j'habitais au-dessus.
Elle me voyait arriver. Elle s'installait dans son fameux fauteuil, je
m'asseyais la caisse, elle s'endormait. (Rires). Je restais parfois
jusqu'à 6h du matin, parce que je devais finir. A l'époque, on faisait
huit cents couverts par jour. Le truc génial quoi ?
Le business de votre compagnon est florissant et vous vous retrouvez
directrice du Bar Américain... Combien de temps dure l'embellie ?
J'ai dirigé le Bar Américain pendant
neuf ans. De 1985 à 1994. J'ai pris cette affaire à un moment donné, avec
un chiffre d'affaires de 8 MF et je l'ai laissée neuf ans plus tard, à
22/23 MF. Mais bon voilà, j'ai fait un passage dans cette maison. Je me
suis bien éclatée parce que c'était sympa. J'ai eu jusqu'à 50 employés.
Le Bar Américain était à l'époque le grand rendez-vous des lyonnais en
général et du show-biz en particulier quand il était de passage à Lyon ;
vous avez de grands noms qui se sont assis à votre table.
Aujourd'hui, on a un partenariat avec
Scoop mais à l'époque, j'avais RMC qui était en face. On faisait des
après-midi dédicaces où il y avait des milliers de personnes mais c'était
moins médiatisé que maintenant. Aznavour, Zabou, Mourousi... Bécaud venait
déguster son tartare avec mon copain Paul Saviotte, journaliste sur Radio
Nostalgie. Il fallait que ce soit moi qui le lui prépare.
Du beau monde aussi pour le tea time...
Michel Serraut venait prendre son thé
quand il jouait aux Célestins. Le grand peintre Couty apparaissait tous
les après-midi pendant que son épouse allait faire ses courses au Grand
Bazar. (Rires) On croisait aussi Jacques Martin, Michel Le Royer...
Des personnalités lyonnaises, et en politique ?
À l'époque c'était l'équipe de
Francisque Collomb. Puis, il y a eu Noir.
C'était un défilé permanent. Combien de temps vous passiez par jour au Bar
Américain ?
J'arrivais vers 8 heures du matin et
j'en partais vers 22 heures. Au début, pendant six mois, je faisais
ouverture-fermeture, quand on a pris. C'est-à-dire 6 heures du matin/1
heure du matin.
Aujourd'hui, l'affaire appartient à Madame Procureur. Quel regard
portez-vous sur cette affaire qui est maintenant sortie du circuit
lyonnais ?
Plus aucun regard. J'y
ai passé dix ans de ma vie, voilà. Stop. J'évite consciencieusement la rue
de la République. Ayant travaillé pendant dix ans au 24 et habité au 64,
donc voilà.
Suite de l'interview
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