Les
humeurs de Toussaint Pothin
Le
bloc-net satirique du 26 novembre 2001
Le
cannabis donne le cancer !
Ce n'est pas moi qui le dis (je ne me le permettrais
pas !), ce sont de doctes savants qui l'annoncent
après de longues études. On savait que les drogues
douces en général, et l'herbe en particulier,
étaient facteurs d'accidents de la circulation,
et sans doute de formidables tremplins pour
les futurs consommateurs de drogues dures. Mais
il y avait toujours quelqu'un pour ergoter sur
ce sujet très discuté. Cette fois-ci, les faits
sont patents. Eh bien, croyez-vous que
ces infos, qui ressemblent à des mises en garde,
vont interpeller notre "intelligentsia
des pentes" qui, depuis des années,
fait la propagande, par l'intermédiaire de sa
"Pravda", de ce qui sera un jour un
fléau aussi dramatique que l'alcool ? Ne rêvez
pas. Nos bobos débranchés vont nous expliquer
que ces études ne valent rien, que derrière
les experts se cachent de faux savants diligentés
par des lobbies.
Il
se pourrait même que ce soit une fausse-vraie
étude réalisée par de fausses barbes non estampillées
au Pavillon de la rue Puits-Gaillot, qui est à
la pensée libre et intelligente ce que le Pavillon
de Sèvres est au mètre étalon.
Chez
ces gens-là, même quand on a tort, et Dieu sait
si l'on a tort (que ce soit en matière de Sécurité,
d'Economie, de Droits de l'Homme, d'Ethique journalistique),
on ne se repent pas, m'sieur, on glose, on juge,
on sermonne, on pontifie, on diffame, on insulte,
on vocifère. Tout ce qui ne pense pas comme soi
est plus ou moins facho. Ces braves gens ne s'aperçoivent
même pas que les fachos, ce sont eux.
Trêve
de méchanceté, puisque les fêtes arrivent, un
peu de compliments ne peut pas faire de mal. Je viens
de recevoir un message d'un de mes vieux copains,
Jean-Philippe Delhomme, perdu de vue il
y a une quinzaine d'années, trop occupé qu'il
était à travailler pour le New Yorker,
Vogue ou le New York Times. Si vous
ne connaissez pas son nom, vous connaissez certainement
ses dessins au style résolument rétro, ses silhouettes
allongées, ses tons aquarellés ou gouachés.
Passionné
d'Art, il égratigne avec férocité les gogos, moitié
gauchistes, moitié consommateurs goulus, dans
son dernier album, "La dilution de l'artiste",
chez Denoël, qui raconte le choc culturel entre
un "artiste de toujours", un peu province,
et un "concepteur d'Art Majuscule" tout
de noir vêtu. Uniformisé. Ce peintre d'autrefois
(?) ou peut-être de toujours, écrit à l'un de
ses amis resté en province : "... ici, devant
tant de prétention, je réalise à quel point il
est précieux que des gens comme vous, si solidement
étanches aux modes, continuent d'exister... Et
votre Nature morte au citron, dans la faiblesse
et la banalité des moyens, un sobre coup de pied
au cul du consumérisme dont on se gargarise autour
de moi. Voilà une uvre qui se passe du financement
de Dieu sait quelle fondation dont nous n'avons
que foutre... Bravo ! Bravo pour votre étanchéité
obtuse !".
Quel
bonheur ! On se sent moins seul. Merci Jean-Philippe
!
Il
s'en prend aux précieux ridicules de notre temps
avec élégance et humour.
Nos
élites seront évidemment agacées par la férocité
du bouquin. En réalité, il n'attaque pas les artistes
mais les galeries, l'Etat, les ministres et autres
adjoints à la Culture, mais aussi les médias qui
font de l'Art une chose sérieuse et prétentieuse.
Il massacre joyeusement ce monde compliqué et
frelaté qui a ses règles, ses codes, ses combines,
ses copinages, ses discours convenus, ses arrogantes
prétentions.
Joli
cadeau à faire pour Noël !
J'apprends
à l'instant qu'un magazine mensuel, honneur de
la presse lyonnaise, tant son contenu était exceptionnel,
tant ses informations étaient "majuscules",
tant son honnêteté intellectuelle était grande,
tant sa qualité d'écriture était enthousiasmante,
tant son objectivité était reconnue, tant ses
informations étaient vérifiées, allait disparaître
après une dernière parution en décembre. Je suis
anéanti ! Je ne peux le croire. J'espère qu'il
s'agit d'une simple rumeur ! J'espère également
que les deux autres fleurons de notre belle presse
du coin, je veux parler de Rétro Lyon
et de Fion Capitale, vont bien (les jeux
de mots à la con sont mis à la mode par notre
intelligentsia ; je m'y vautre avec ravissement).
Ça serait dramatique si la contagion devait les
atteindre. Je crois bien que je ne m'en remettrais
pas !
A
suivre, le
bloc-net du lundi 19 novembre 2001
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