Journée
de la Femme
Guy
Baret - Le Figaro du mercredi 13 février 2002
Madame
de Fontenay votera pour Miss Laguiller
La
campagne électorale qui s'ouvre nous réserve quelques surprises,
heureusement d'ailleurs, sinon la riante campagne serait morne plaine.
L'électeur a bien le droit de connaître quelques joies inattendues à
l'occasion du grand débat aux répliques convenues.
La
première surprise vient d'où on ne l'attendait pas, ce qui est
normal, puisque, sinon, cela n'aurait pas été une surprise, à savoir
de Mme de Fontenay. Oui, celle-là même qui se signale à notre
attention et à celle des médias en couronnant de gloire, de lilas et de
roses une rougissante Miss France annuelle, dans les flonflons et les
falbalas. Mais pour être grande organisatrice, elle n'en demeure pas
moins citoyenne à part entière, et, à ce titre, elle a le droit de
choisir son cavalier dans le bal des prétendants. On ne s'étonnera guère
que ce soit une prétendante, solidarité féminine oblige. En revanche,
son choix apparaîtra singulier, puisqu'il s'agit de la rugueuse Arlette
Laguiller. Ce n'est pas un simple coup ce chapeau, qu'elle a
pourtant ample, mais un soutien financier et, osons le dire, militant.
La
scène du ralliement a eu pour cadre un plateau de télévision, celui de Match
TV, où la passionaria de Lutte ouvrière enregistrait une énième
prestation. Mme de Fontenay en était l'invitée surprise. Nos confrères
pensaient sans doute le mélange explosif, la grande bourgeoisie contre la
vestale de la révolution. Il le fut, mais pas dans le sens attendu. Après
s'être découvert des points communs, la tutrice des Miss France a
tendu un chèque à Arlette pour le financement de la campagne, laquelle
n'en revenant pas, lui a murmuré : « Je vous
remercie beaucoup », ce qui était bien le moins. L'émission
a été diffusée hier soir.
Toutefois,
cette contribution financière n'est pas un moyen commode pour se
dispenser d'agir en faveur des « travailleurs et des travailleuses ».
Mme de Fontenay a l'âme militante. Elle a raconté son combat
victorieux pour l'oppression capitaliste en obtenant du Franprix
de Saint-Cloud du chauffage pour les caissières. Cette action décisive
en faveur de l'émancipation prolétarienne a été droit au cur d'Arlette
Laguiller, qui s'est rendu compte qu'elle n'a pas le monopole de la
révolution, au moins à Saint-Cloud.
Toutefois,
même en tendant l'oreille, on n'a pas entendu le ricanement
d'outre-tombe de Trotski : il a dû être étouffé par sa
barbichette quand il a vu Mme de Fontenay apporter sa contribution à l'édification
de la dictature du prolétariat. La libération de la femme par le
couronnement d'une Miss ne figurant pas dans le programme de la IVe
Internationale, ni dans celui des précédentes. On ne sait pas ce qu'en
a pensé arlette. Peut-être a-t-elle songé à ce propos de Lénine, qui
annonçait le jour où les bourgeois eux-même lui fourniraient « la
corde pour les pendre ».
A
suivre, La fin d'une époque...
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