Edith Simonnet : les beaux vertiges de la sculpture
Propos recueillis
par
Françoise Petit
Photo Jean-Luc Mège
Elle ne s'est pas accrochée aux chimères cathodiques. Sa façon de vivre sans
chaînes a libéré une artiste charnellement attachée à la terre qui se sculpte.
Avec Edith Simonnet on aime la vérité d'un langage extra muros. La vie sans la
ville mondaine, la création sans manège people, la beauté sans artifice...
Lyonpeople: Nous vous avons connu dans la petite lucarne aux débuts de T.L.M,
vous êtes aujourd'hui l'artiste que l'on reconnaît. Qu'avez vous fait entre ces
deux périodes?
Edith Simonnet: Après cette première expérience de télévision à Lyon, je suis
repartie à Paris où je me suis inscrite dans un atelier de sculpture pour
acquérir les premières bases de la terre cuite, du plâtre, de la taille. Un vrai
travail d'atelier avec des modèles
vivants, des thèmes imposés. Je suis ensuite allée à Monaco, présenter les
journaux de Télé Monte-Carlo, puis j'ai participé à la création de LCI où je
présentais les journaux de la mi-journée. J'ai enfin travaillé pour Santé Vie
une chaîne câble et satellite du groupe Lagardère où je produisais des émissions
psy. Je continuais de sculpter. J'ai ainsi réalisé des trophées pour le Prix
Littéraire du Club Med, le Prix du Livre et le Prix du Film Europe 1, ou pour
des manifestations plus ponctuelles.
Y a t'il des passerelles entre le journalisme et la sculpture ?
Pour moi il n'y en a jamais eu. J'ai toujours vécu ces deux mondes en parallèle
sans aucune connexion. Les journalistes ne comprenaient pas bien comment je
pouvais vouloir quitter la télé son lustre, ses paillettes. Et je suis
probablement un peu suspecte aux yeux des artistes devenir d'un monde qu'ils
jugent superficiel et factice. Ces deux langages font pourtant partie de moi.
J'ai autant aimé regarder le monde et tenté de comprendre mes contemporains en
étant journaliste, que j'aime aujourd'hui donner vie à mon monde intérieur avec
de la terre et des pinceaux.
A quel moment avez vous pensé que le sculpture, et la peinture aussi
d'ailleurs, était la meilleure façon de communiquer?
Je ne sais pas si la sculpture et la peinture sont la meilleure façon de
communiquer, mais c'est sans doute le mode de communication le plus proche de ma
pudeur. Je n'ai pas réussi, étant jeune, à convaincre mes parents de me laisser
faire les beaux-arts, j'ai dû alors me diriger vers un autre métier, mais la
peinture et la sculpture étaient déjà là. Aussi loin que je m'en souvienne, j'ai
toujours peint, toujours travaillé la terre et le plâtre. C'est une grande
chance de pouvoir vivre de ce que l'on aime, une grande source de d'angoisse
aussi. Une nouvelle vie a commencé, un grand saut dans le vide, vertigineux et
excitant.
L'exposition qui vient de se terminer à "Création Contemporaine" fut un
véritable succès, vous y avez travaillé longtemps, comment avez vous vécu ce
rendez-vous avec les lyonnais?
J'ai été très heureuse de l'opportunité que m'a offert Gilles Bruyère de pouvoir
présenter mes uvres à Création Contemporaine. C'était l'occasion pour moi de
présenter le travail de ces deux dernières années ; quarante-cinq sculptures et
peintures dont certaines faites spécialement pour cette exposition. C'est le cas
par exemple de ces danseurs en résine qui se suspendent comme les lustres. Ils
resteront ici ainsi qu'une série de bronzes tout l'été. C'est toujours un grand
tourment pour un artiste de présenter son travail. Comment va t-il être perçu ?
Que va t-on entendre le soir du vernissage, vont-ils seulement regarder les
uvres? Ce rendez-vous à Création Contemporaine a été extrêmement chaleureux. Je
me suis sentie choyée et j'ai vraiment eu le sentiment d'avoir rencontré les
gens, de les avoir amenés vers mon univers tout en allant à la rencontre du
leur.
Dans cette expo La Danse occupe toute la scène, pourquoi ?
La danse m'habite depuis que je suis toute petite. Comme la plupart des très
jeunes filles de ma génération, j'ai fait de nombreuses années de danse
classique, et à dix ans je n'avais qu'un rêve, intégrer l'école des petits rats
de l'Opéra de Paris. Je connais et j'aime l'effort, la douleur que l'on impose
au corps pour le rendre plus souple plus performant, plus beau. J'aime ce défi
permanent à l'apesanteur, cette volonté d'arrêter les élans, de faire durer les
sauts; de suggérer le désir, la peur, l'amour, sans qu'aucun mot ne soit
prononcé.
Guy Darmet est-il venu voir l'exposition ?
Non mais j'aimerais le rencontrer pour lui dire que je vais aller au bout de
cette série de danseurs, enrichir encore mon travail pour le présenter pourquoi
pas à la prochaine biennale. Dans ce sens l'Association des Amis de la Maison de
la Danse de Lyon m'a
chaleureusement encouragée. Dans l'avenir j'ai également très envie de réaliser
des
sculptures de plus grand format, mais les entreprises françaises sont très
frileuses pour faire confiance à des artistes vivants! Enfin, j'ai en projet une
exposition à l'étranger, mais chut c'est encore trop tôt pour en dire plus !
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