Régine
Goinère, cancéreuse mais pas contagieuse
Un
cas peu banal pour les uns, un miracle
permanent pour les autres... Régine Goinère
ne laisse personne indifférent. Atteinte
d'un cancer en 1990, celle à qui l'on
avait pronostiqué six mois de survie n'en
finit pas de nous étonner. Portrait.
C'est
dans le 6ème
arrondissement qu'une petite Régine
fait son apparition aux premiers jours du
printemps 1949. Ses parents pharmaciens
confient la petite princesse aux Dominicains
de Chalon sur Saône. Si elle en garde un
souvenir mitigé, elle n'en a pas perdu la
foi pour autant. Rentrée à Lyon, elle intègre
le Goethe Institut. Puis se marie à 20
ans avec un informaticien. Les tourtereaux
s'installent pendant quatre années sur
Paris. De retour à Lyon, un petit Raphaël
- qui a fait une entrée remarquée
entre-temps - aura tôt fait d'accaparer
toute son attention. Jusqu'à devenir mère
au foyer ? « Non, plutôt
maman-kangourou. Je l'emmenais partout. »
Raphaël
a déjà des culottes courtes quand Régine
accompagne son oncle à une réunion du
« jeune qui monte » , le
fringant Michel Noir. La jeune maman
accepte la responsabilité de son association
« J'habite » pour le 5ème
arrondissement. Tant et si bien qu'elle se
retrouve tête de liste noiriste pour les
municipales de 1983. A la surprise générale,
sa liste réalise un score de 26% et Régine
(ci-dessous avec le Père Devert) se
voit propulser à l'hôtel de ville.
Après
l'euphorie de la campagne, les mesquineries
de la politique ne plaisent guère à notre
rebelle, les consignes de groupe non plus :
« Le doigt sur la couture du
pantalon, c'est pas mon truc ». Et
pour cause, elle se trimballe en mini-jupe...
Six
ans sur les bancs du conseil municipal, et
revoilà Régine à la veille d'une nouvelle
campagne. Avant que le clash ne se produise :
elle rue dans les brancards en refusant d'évincer
de sa liste les fidèles de la première heure
au profit des nouveaux amis du « Grand ».
« Goinère quitte Noir »
titre la presse régionale en 1989. Elle se
doute qu'elle quitte la vie politique pour
toujours. Pas la vie tout court.
Une
rupture qui intervient l'année de son
quarantième anniversaire. Au moment même, où
« le crabe » va bouleverser sa
vie. Depuis quelques mois déjà, Régine
souffrait d'une fatigue diffuse. Impossible
d'en déceler la cause. Jusqu'à une nuit
de décembre 1989 : une violente douleur
« comme un coup de poignard dans le
dos », un transfert à l'hôpital,
des radios qui s'enchaînent. Comme les
mauvaises nouvelles. Et un mal dont on peut
enfin dire le nom : cancer. Devant le médecin
qui lui annonce le terrible diagnostic, Régine
fond en larmes : « Et mon fils !
» implore-t-elle.
Au
beau milieu de la nuit dans laquelle elle
s'enfonce, c'est son amour filial qui va
lui servir de fil d'ariane. Et lui permettre
de s'accrocher. « Tous les jours,
je me disais : je ne veux pas qu'il
soit orphelin ! » Les traitements
lourds s'enclenchent, les séjours à Léon
Bérard s'enchaînent. « Je
pars aux Baléares ! » dédramatise
courageusement Régine quand elle annonce à
ses proches une nouvelle hospitalisation. Le cur
suit alors que le corps sombre inexorablement.
Début 1990, alors que de nouvelles métastases
font leur apparition, les cancérologues lui
pronostiquent 6 mois de survie. Pas plus.
« Le
crabe en pince pour moi » se
souvient Régine. Qui est à nouveau
hospitalisée à Léon Bérard « sans
cheveux, sans jazz, sans électricité. Je ne
ressemblai plus à rien. C'était vraiment
ET téléphone maison ». Dans pareil
cas, tout un chacun penserait qu'il vit là
la pire année de son existence. Pas pour elle : « C'est
là que j'ai commencé à vivre ! »
Affaiblie mais pas terrassée,
Régine concentre ses dernières forces
vers... les autres ! Et crée même une
association. « Vivre avec ».
Un nom clair comme de l'eau de roche. Un
engagement limpide pour cette amoureuse de la
vie : « Pour apprécier quelque
chose, il faut en connaître le prix. Je suis
milliardaire, je paie tout très cher ! »
Depuis
12 ans, Régine livre un combat quotidien
contre sa maladie. Avec des périodes de rémission
et de rechute. Sans rien en laisser paraître.
Elle est coquette et pleine d'esprit.
Toujours d'attaque, souvent surbookée.
Outre l'association « Vivre avec »
dont elle assume la présidence (voir chronique),
elle est administrateur de la Ligue
Nationale contre le Cancer et conseiller
technique de Jean-Claude Lavorel,
fondateur de LVL Médical.
Comment
explique-t-elle son inattendue longévité ?
« Le cancer est une maladie
classique, mais moi j'ai un cancer baroque ! »
Sacrée Régine !
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