Le conte de fées de Nicolas Fafiotte
Photos © Jean-Luc Mège
Par Françoise Petit
C'est un peu son
église, sa sacristie, son atelier, sa cuisine.... Né dans la foi du Dieu Mode,
Nicolas Fafiotte confesse ses rêves de soie dans l'antre de ses jours qui
finissent la nuit. La boutique du styliste est le repère essentiel de sa
créativité, son « home » bis.
Ses petits matins s'ouvrent au Café Bellecour devant un café sans croissants,
régime oblige. Une boîte de sucrettes à l'effigie de K Lagarfeld neutralise les
poussées de gourmandise d'un Nicolas Fafiotte dévorant la vie à plein temps.
L'épicerie fine de ses parents à Oyonnax aura été le théâtre de ses premières
amours pour le bon et le beau. Le bon car « chez Faff » s'achetaient (et
s'achètent encore) les meilleurs produits du terroir, le beau car dans ce temple
du goût défilent les femmes les plus élégantes de la ville. La capitale de la
plasturgie est « insoupçonnablement » tendance. Le petit Nicolas avec ses
certitudes de gamin obstiné le sait et veut le prouver. Alors que les robes de
Dalida ont le don de l'émouvoir -plus que les cours de maths-, papa et maman
haussent le ton pour que le fiston ne file pas du mauvais coton. Le refrain est
clair : « tu iras travailler à l'usine !». L'élève Fafiotte trouve illico un
biais pour échapper à cette provocation affective ! Inscrit en Bep de
comptabilité, « le petit Faff » s'organise une double vie : en « in » les
chiffres en « off » les dessins de mode. Faute de moyens pour assouvir sa
passion, notre styliste en herbe, sans miss France sous le coude, recrute à 17
ans une poignée de mannequins dans les rangs de sa classe. Toile cirée du
jardin, rideaux de boutique, robe de chambre paternelle, et bouts de ficelles
architectureront les silhouettes de ses camarades peu formatées à cet exercice.
La robe de mariée Fafiotte lovée sur et pour Barbara brille de mille strass (de
lunetiers), l'examen de podium prend à cette date autant de valeur que ses
efforts pour parvenir au Bac. Le parquet poussiéreux du grenier familial s'en
souvient encore.
Une bulle sans tulle
Sa vraie maison est une adresse secrète, « je n'y suis pas souvent, c'est ma
bulle, mon jardin, seuls mes proches ont le droit d'y entrer » explique
Fafiotte qui nous reçoit dans son nid bis rue du Plat. Salades de chez Pignol,
recette importée de la Mère Brazier, mousseline de courgettes à réchauffer au
micro-ondes pénètrent dans la boutique les jours de grande créativité. Une chute
de tulle en guise de nappe ? Les choses doivent aller vite ! Cindy, sa
maquilleuse préférée grignote avec lui en attendant la visite de Thérèse
responsable de sa ligne prêt à porter mise en lumière dans le halo du 8
décembre. Petites pauses et longues périodes à l'ouvrage rythment les journées
du jeune couturier : croquis, essayages, préparation d'un défilé à Naples où
réflexion sur le oui ou non d'un show annoncé au Qatar ! Parce qu'il a horreur
de l'avion Nicolas se prive d'évidentes possibilités de mieux se faire
connaître. Qu'importe sur le plancher des vaches, il plane sur les pages de ses
livres de mode accumulés sur des étagères Ikéa : « les bouquins qui ne sont
pas à la boutique sont dans ma bulle, je les consulte en permanence et aussi
souvent que je regarde les vidéos ou toutes émissions concernant la mode »
Vin, amour et musique mettent aussi en appétit le « grand Faff » qui joue à ses
heures choisies les tontons tendresse avec Amandine et Maelys. Avec elles
seulement Nicolas oublie Fafiotte !
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