De notre envoyé spécial
Stéphen Derrick
Mais que se passait-il ce
jeudi 23 février à la Cité Internationale ? Une quinzaine de véhicules de police et des agents verbalisant à
tour de bras, trois camions de la fourrière tournant à plein régime et un quai
Charles de Gaulle qui se farcissait une indigestion de voitures et des cars
venus des quatre coins de Rhône-Alpes... On aurait pu croire à un Derby OL-
Saint-Étienne tant la foule était nombreuse. Les militants et sympathisants de
l'UMP étaient simplement invités à passer une Sarko Soirée. Pas d'invité
mystère. Juste un ministre, Nicolas Sarkozy et tous les généraux étoilés
de l'UMP.
Le compte est bon
Palais des Congrès ou aéroport international ? Psychose
sécuritaire oblige, à l'entrée tout le monde dépose sagement ses objets
métalliques sur la table et passe sous un portique. Hervé Gaymard arrive,
s'engouffre sous l'un de ces portiques. Il sonne mais poursuit son chemin. Quel
privilège ! Personne n'a vérifié s'il avait en sa possession un couteau
savoyard ou un service à raclette.
A 18h30, les murs de
la Cité Internationale commencent à craquer. On ne peut plus y caser un
seul militant UMP. Avec 3000 personnes, la salle du bas est fermée... de
l'intérieur. Les jeunes militantes en tee-shirt rouges mais pas du genre
farouches forment une haie d'honneur.
Dans le grand hall qui y conduit, continue pourtant de
s'agglutiner une foule toujours plus nombreuse. A l'étage deux salles avec
écrans géants accueillent ceux qui ne peuvent pas descendre. Au total, 6000
personnes selon les organisateurs. Et 6000 selon la police... Sur l'estrade, une
jeune beauté très working girl vient mettre une touche de glamour au milieu
d'une escorte quasi-exclusivement masculine...
Sarkocoboys et sarkocogirls
Les minutes passent. Mais que fait-il ? Une rumeur explique
son retard par la présence du ministre de l'intérieur à la grande synagogue de
Lyon pour une cérémonie en l'honneur du jeune Ilan Halimi. Nous
apprendrons plus tard que c'est Jean-Michel Dubernard qui représentait le
Ministre quai Tilsitt. Des conversations s'engagent entre militantes UMP BCBG
sur les vertus de leur idole toute puissante. Il paraît qu'il change même le
plomb en or. Silence dans l'assistance...
18h45, les escalators sont bloqués. Plus personne ne peut
descendre. Pourtant quelques happy few jouissent de ce privilège comme
Emmanuel Hamelin, le député de
la Croix rousse, Henry
Chabert son prédécesseur. Ou quelques journalistes. En bas des escalators,
une haie de jeunes sarkocoboys et sarkocogirls de la 5e
circonscription attendent Nicolas, pancarte à la main. Lorsqu'il arrive, il
emprunte les escaliers d'à côté. Raté !
L'UMP a fait briller ses étoiles
Le ministre de l'intérieur entre dans une salle dopée au
guronzan. Une salle en transe. Il monte sur une scène où l'UMP étale ses
généraux. Les embrassades commencent ! Que d'étoiles ! Les députés lyonnais :
Christian Philip, Jean-Michel Dubernard et Emmanuel Hamelin.
Ceux du Rhône : Bernard Perrut, Michel Terrot. Ceux de
départements rhônalpins : Bernard Accoyer, député-maire d'Annecy-le-Vieux
(Haute-Savoie) et président du groupe UMP à l'assemblée nationale, Dino
Cinieri député-maire de Firminy (Loire) qui rentrait d'un voyage en Inde
avec Jacques Chirac. Les conseillers régionaux : Laure Dagorne,
Jean Girma, Danièle Noir... qui manque se pâmer en l'enserrant !
Le maire d'arrondissement au présent : Patrick Huguet
(3e). Les maires
d'arrondissement au passé :
Alberic de Lavernée (2e),
Dominique Nachury (6e),
Jean-Flacher (3e). Une eurodéputée : Françoise Grossetête.
Michel Havard, secrétaire général de l'UMP du Rhône. Au milieu des
étoiles, une comète, celle de Haley : Michel Noir. A en croire leur tenu
vestimentaire, la mode, cette année, sera au noir ou au marine.
Dominique, 61 ans, chauffeur de salle
Dominique Perben,
candidat autoproclamé à la mairie de Lyon, prend la parole. En bon chauffeur de
salle, il s'essaie à deux ou trois blagounettes sur Collomb. Il explique
combien le maire de Lyon n'écoute pas les Lyonnais comme les riverains de la
chaufferie du 8e ! La salle reste tiède. Elle veut Sarko, pas
d'ersatz. Le ministre-candidat rappelle qu'il est Lyonnais. Il y a fait ses
premiers rototos, puis ses premiers pâtés de sable. Mieux encore il sort
l'argument imparable : ses amis sont lyo-nnais ! Trop fort. Un couplet sur son
amitié avec le ministre de l'Intérieur depuis 1993. Et voilà pour ceux qui
disent que Nicolas ne juge pas Dominique assez sexy pour Lyon. Pensez-vous une
amitié de 13 ans ! Et puis, il joue un couplet sur le registre « Allez, Nico,
dis-leur que cest moi le candidat. Allez s'te plait, dis-y ».
Nicolas, 51 ans, decomplexificator de la droite
Arrive le moment tant attendu de la soirée. Nicolas se
lève. Les femmes se pâment. Le Sarkococoshow peut commencer. Derrière lui, le
slogan de l'UMP : imaginons
la France d'après. C'est sûr
qu'il imagine très bien
la France
d'après Chirac qu'il ne manque pas de tacler au passage : « Même
jeune, je n'ai jamais été de gauche. Le complexe gauchiste ne m'a jamais
touché !* » Il distribue les bons et mauvais points. Une cuillère pour
Dominique : « T'es candidat et vous avez intérêt à tous être derrière lui. Je
ne veux voir aucune tête qui dépasse sinon on va encore se ramasser une gamelle ».
Une cuillère pour Henry : « Toi, tu vas jouer à Villeurbanne ». Chacun
chez soi, et les moutons seront bien gardés. Oubliée la rumeur qui faisait de
Chabert un remplaçant de Perben. Une cuillère pour Charles Millon
pourtant absent mais dont les amis sont tous dans la salle comme Erick Roux
de Bézieux, Elodie Humeau, Jean-Jacques David, Monique
Raimond-Chabanel : « Charles, tes amis sont mes amis ! ».
Un jeune contestataire anar entonne « Maréchal, nous
voilà ! » Il n'aura pas le temps d'entamer la seconde strophe. Expulsé par les
gros bras du SO, il est hué par la foule... Nico s'en donne à cur joie : « Soyez
respectueux des minorités, surtout celle-ci qui est en voie de disparition... »
Fous rires garantis ! Puis, le petit Nicolas se lance - à l'impro - dans le
portrait du meilleur candidat de l'UMP : un talent, une énergie, une volonté.
Bref, tout son portrait. Enfin, il veut décomplexer la droite. Qu'elle soit
fière de ses valeurs, nom d'un chien ! Une heure de discours plus tard et la
chemise trempée, Nicolas s'arrête. Decomplexée, la salle est en délire. On passe
à la Marseillaise. Sur
les écrans géants retransmettant le show qui ne laisse aucune place au hasard,
deux visages. Ceux d'Henry Chabert et de Nicolas Sarkozy. Dominique Perben est
toujours le candidat de l'UMP à la mairie...
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