En attendant qu'il
soit prêt, continuerez-vous à diriger votre affaire, comme Francisque
Collomb ou Paul Bocuse à 80 ans?
Françoise a 48 ans, j'ai une équipe à
Brignais dont la moyenne d'âge est de 28 ans, le plus ancien qui va partir
à la retraite c'est Serge dans 4 ans. Les autres chefs de poste ont 30
ans, 32 ans, 27 ans et 34 ans. L'entreprise est assise avec des gars
solides. Mais ils m'ont posé la question « et après ? ». Je leur ai dit :
« Après il y a Françoise, Baptiste, Nicolas et moi. »
A quel âge comptez-vous arrêter ?
Est-ce que vous y avez pensé ?
Ah bah bien sur ! Mais qu'est-ce
t'appelle « s'arrêter », prendre sa retraite ? Si je dis je prends ma
retraite officiellement, j'ai dit à 65 ans.
Nico :
Vous serez encore dedans après...
Et après, tu es bien encadré. Nous on a
des gars sérieux, fabuleux, des types que l'on a motivés, eux ils
demandent qu'il n'y ait qu'une suite derrière. J'ai même le fils de Pierre
qui travaille avec nous et qui s'occupe d'Eurexpo.
Aujourd'hui malheureusement, la mode
dans votre profession c'est de vendre l'entreprise familiale... On peut
citer Tourtiller, Lacombe, Rinck...
Au fond de moi, je préfère la
transmettre. Mon but n'est pas de la vendre mais de la transmettre et de
la pérenniser. La passion de ce métier et de faire avancer les choses,
c'est ce qu'il y a des plus beau...
C'est ce que vous voulez transmettre à votre deuxième fils ?
Oui. Je lui ai dit :
«Ecoute moi, tu fais des études quelles qu'elles soient, sciences po, ou
cela, c'est fabuleux, tu auras un bon salaire dans ta vie. Mais tu ne
pourras jamais donner l'expression de toi-même, tu seras sous la coupe
d'un patron. Quand tu es chef d'entreprise, tu mènes ton entreprise, tu
vois qu'elle avance, qu'elle explose, qu'elle fait du chiffre, que les
clients sont contents, que tu peux investir,... ». C'est génial. A mes gars,
parfois je dis : « Demain on est obligé de finir à minuit car on a de
grosses commandes, je compte sur vous ! ». Sur 90 qui sont en cuisine,
y'en a 60 qui répondent : «Ok, on y va ». C'est ça qui est fabuleux !
Comment faites-vous pour les récompenser ?
Ceux qui sont
récompensés, ils ne m'ont jamais demandé d'augmentation, ça vient
automatiquement. Par contre, ceux qui ne sont pas malins, ils viennent
tous les mois automatiquement me demander « quand est-ce que vous penser
m'augmenter mon tarif horaire ? », « je vais y réfléchir ! et puis si ça
ne va pas, je ne retiens personne ! ». Ceux qui me reçoivent me disent
« merci, je suis très sensible à ce que j'ai reçu. »
Baptiste sera-t-il votre successeur ?
S'il
l'est, ça sera merveilleux.
Suite de l'interview
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