Jean-Paul Lacombe jette
l'éponge
Par Marc Polisson
C'est devenu une (triste) habitude. Il y a peu, nous vous parlions du
départ des Tourtiller et des Rinck (voir
chronique).
On pourra désormais rajouter Léon de Lyon sur la liste des abandons (en
pleine ascension). Une nouvelle défection qui ne semble affecter que nous...
si l'on en croit par les commentaires laconiques de nos confrères.
La lecture du dernier édito de « La vie de nos bistrots », le trimestriel
qu'il édite nous avait mis la puce à l'oreille. Titré « La vie sans
chagrin », le texte signé Jean-Paul Lacombe délivre un message
amer : « Aujourd'hui, les cuisines de l'Hexagone sont le plus souvent
moroses. A des clients qui l'ignorent, un chef doué se doit de donner le
change, écrasé sous les charges. (...) Je ne souhaite pas insister. » Le
8 mars dernier, au cours d'une conférence de presse solennelle, le gendre
de Georges Duboeuf a annoncé que Léon de Lyon « fera son
dernier service le 31 décembre 2007 » insistant sur le fait que « la
maison n'a jamais été aussi belle et que les bilans sont positifs ».
« Je suis heureux de reposer ma toque et vous assure qu'il y aura pour
moi une vie après la gastronomie. » La maison qui fait partie du
patrimoine lyonnais a été fondée en 1904. Elle est entre les mains de la
famille Lacombe depuis 1949.
Alors que s'est-il passé dans la tête de Fabienne et Jean-Paul
Lacombe ? Plusieurs hypothèses sont avancées par des proches du couple,
durement affecté par la disparition de leur fille il y a plusieurs années.
Ce n'est pas non plus du côté de leur fils, âgé d'une vingtaine d'années
qu'ils peuvent s'appuyer, très porté sur le vin qu'il est. C'est donc dans
sa belle famille qu'il devrait s'épanouir professionnellement. D'autres
évoquent un « ras-le-bol » et « la pression des étoiles ». A
ce propos, il est important de souligner qu'après 27 ans de deux étoiles,
JPL était sans doute las d'attendre un hypothétique 3ème
macaron. Si celui-ci était tombé dans son escarcelle, le destin du Léon
en aurait été sans doute changé (Jean-François Mesplède a préféré
honorer un Breton mal élevé). Le départ de Joseph Viala, son bras
droit en cuisines pendant une dizaine d'années, a également eu une
incidence décisive. Depuis le restaurant gastronomique occupe à nouveau
90% de son temps (pour 20% du CA du groupe).
Jean-Paul Lacombe va désormais se consacrer à son petit empire (11
millions d'euros de CA) qui comporte un hôtel de 30 chambres et 10
« bistrots de cuisiniers ». Mais quid à terme de leur image alors que leur
notoriété repose sur le savoir-faire du restaurant gastronomique ? Il en
va de même des brasseries de Paul Bocuse. Et puisqu'on parle du
Chef de Collonges, ce dernier sera-t-il le seul à accomplir son devoir de
transmission ? Qu'adviendra-t-il des lieux après la fermeture ? JPL
transformera-t-il l'endroit en brasserie comme son confrère Alain
Senderens ? Où cédera-t-il les murs (1400 m2) dont il est propriétaire
au plus offrant ? Ces questions et toutes les autres évoquées plus haut,
nous souhaitons les poser à Jean-Paul Lacombe au cours d'un interrogatoire
à KGB. Nous espérons que le dernier chef du Léon de Lyon répondra
par la positive à notre conviviale convocation. D'ici là, il aura tout
loisir de (re)lire la parabole des talents.
Les réactions
Il y a plusieurs
années que j'ai quitté la région lyonnaise mais quels merveilleux
souvenirs je garde de ce restaurant, de l'ambiance où l'on se trouvait
bien - presque chez
soi - accueil chaleureux et souvenir gastronomique inoubliable. La
France perdrait-elle ses valeurs les plus nobles ?
Je le crains.
Joseph Cornet,
le 12 mars 2007
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