Un Lyonnais chez les pirates...
De
notre correspondant Mehdi
Le sujet semble exaltant - qui n'a pas
rêvé en effet d'appartenir aux pirates
du Capitaine Crochet - et pourtant... Au
21ème siècle voici que la
piraterie, cet art du terrorisme des
eaux, refait surface pour apposer de
son souffle noir un voile
supplémentaire sur la paranoïa
mondiale d'une apocalypse toute
proche.
Que les Lyonnais se rassurent
toutefois : il y a peu de chance que
l'Hermès, pris en otage par une équipe
de nazillons hystériques, vienne
accoster le confluent une nuit de
brouillard afin d'empêcher la mairie
de construire son méga supermarket à
Lyon : la résurgence de la piraterie
moderne est une histoire asiatique...
C'est Eric Frecon,
lyonnais de 27 ans, qui dans son
ouvrage intitulé « Pavillons noir
sur l'Asie du Sud-Est » lève le
voile sur les attaques pirates dans
l'archipel indonésien, notamment à
niveau du détroit de Malacca.
Parti avec un ami dessinateur dans
l'archipel de Riau, le jeune
universitaire va très rapidement
pénétrer un repaire pirate : au
programme « Thé et bordel » via
quelques règles communautaires dignes
des fictions de films US vendus au
Kilo.
Mais
ne nous méprenons pas : si Eric
Frecon ne semble pas avoir froid
aux yeux, il est à l'instar d'un
archéologue bien connu nommé
Indiana, un chargé d'études tout à
fait surprenant du Centre
d'Enseignement Supérieur de la Marine
(CESM), prix du « jeune journaliste »
de la fondation Hachette en
2001 et il prépare en outre une thèse
de doctorat à l'IEP Paris.
L'inquiétude du chercheur, à propos
d'un sujet qui peut sembler
anachronique, amène dès lors à
s'interroger sur les conséquences
éventuelles de cette « nouvelle
menace ».
C'est le Bureau Maritime
International (BMI) qui le 24
octobre dernier plaçait l'Indonésie en
tête des pays contribuant à la
piraterie dans le monde. La difficulté
dans une région qui contient 60% de la
population mondiale pour 40% de sa
consommation et qui pourrait « être
le futur centre géopolitique de la
planète », réside dans le fait que
80% des ressources en hydrocarbures de
l'Asie transite par le détroit malais.
En outre si le fret aérien - malmené
par les attaques terroristes - ne
représente que 5% des échanges
commerciaux, la part du fret maritime
représente pour lui seul 80% de ces
échanges.
Enfin depuis l'attentat du 12 octobre
dernier à Bali, les services de
renseignement américain semblent
craindre que des terroristes puissent
détourner des pétroliers ou des
méthaniers pour les faire échouer dans
un grand port tel que Singapour. Eric
Frecon partage cet avis : « ...il est
certainement plus facile de détourner
des navires chargés d'une cargaison
sensible que deux Boeing.(...) Ils (les
terroristes) provoqueraient une
catastrophe écologique et bloqueraient
un passage stratégique du monde
entier ».
« Pavillon noir sur l'Asie du
Sud-Est »
Eric Frecon (préface de Jean-Luc
Domenach)
IRASEC - L'Harmattan, Bangkok -
Paris, décembre 2002
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