Fini
le charme suranné de la Charité, Le Progrès a déménagé !
De
notre envoyé spécial, Armand d'Autrement
Les
mauvaises langues (les plus médisantes et non les moins bonnes amantes)
de Lyon prétendaient que le quotidien régional ne changerait jamais. Or
le 2 mai, en ouvrant le journal, je découvre que l'institution a changé...
d'adresse ! « Le Progrès s'installe rue Servient » dixit une page
d'auto promotion : photos à l'appui, la rédaction a pondu un papier
susceptible de figurer dans les manuels des conseillers d'orientation
pour élèves en fin de cycle et, accessoirement, d'informer le lecteur
sur la nouvelle vie des journalistes qui, selon l'auteur, seront
contents, du côté de Servient, dans le 3e arrondissement.
À
l'entrée, deux hôtesses exigent que je montre patte blanche. Je décline
mes nom et prénom, j'évite de donner mon grade et je suis pris de
court lorsque la ravissante me demande le motif de la visite et le nom de
la personne que j'entends rencontrer. Je contourne la difficulté et
suis affublé d'un badge blanc qui signale ma qualité d'étranger.
Après
m'être battu avec l'ascenseur et sa peinture trop fraîche, je suis
ébloui en arrivant à l'étage de la rédaction : la luminosité trop
forte que laisse passer les baies vitrées me paralyse sur le pallier au
moment où surgit une jolie brune, comme un diable sorti de sa boîte. Je
devine, derrière la cloison, sa boîte-bureau... cachette ? Peu importe,
je l'ai percutée de plein fouet.
Une
fois mes yeux accoutumés, je découvre l'ambiance : les bureaux confinés
des anciens locaux de la Charité (où il était si bon de s'isoler !)
ont été remplacés par un plateau où chacun peut, à sa guise, profiter
du bruit ambiant provoqué par les dizaines de conversations téléphoniques
qui s'entrecroisent tandis que tout le monde court après tout (dossiers
de presse, papiers géniaux et bonbons) et tout le monde (grand chef,
chefs et sous-chefs). Un responsable m'explique que « c'est normal
: il va falloir quelques jours pour retrouver les marques et puis, de
toute façon, les journalistes n'aiment pas qu'on les déménage
».
Les
anciens, eux, paraissent s'atteler à la tâche : constatant que « ce
qu'il manque, c'est l'odeur des canons et du saucisson », ils
planifient les pots à venir pour remédier à cette situation invivable.
Effectivement, l'immeuble sent trop le propre, pas assez la cigarette
des nuits « passées sur l'ouvrage » et respire encore moins la
convivialité des verres partagés pour refaire le monde. Une tête connue
vient me saluer avant de s'emporter : « c'est incroyable mais vrai : on n'avait pas le
chauffage ni la lumière quand on s'est
installé. Résultat : on allait bosser à Chassieu ».
Chassieu, vous avez dit Chassieu ?
Car,
si le nouveau siège du Progrès devait réunir toute la rédaction,
plusieurs dizaines de journalistes manquent à l'appel : les fameux «
Chassieu ». Forte présence des syndicats oblige, les monteurs, chargés
de réaliser la mise en forme des pages, refusent de se disperser rue
Servient et de s'éloigner de la coquette maisonnette achetée à
quelques mètres du « travail » dans cette riante banlieue de
l'Est lyonnais.
Ce qui bloque le déménagement des rédacteurs qui « bossent
» avec eux... Le sujet est apparemment sensible puisqu'il provoque un
attroupement des « pour » qui se battent « contre ... »
et des « contre » qui se battent « pour... ». « Tout
devrait être rentré dans l'ordre à la fin de l'année »
s'est juré Michel Nozière, le nouveau P-dg du groupe (ci-dessus
en compagnie d'Anne-Marie Comparini). Rendez-vous pour
l'inauguration en décembre prochain.
|