La vie en Vavro
De notre correspondante
Françoise Petit
Dominique et Alain Vavro habitent une solide maison qui
semble bétonner les fragilités d'artiste. Dans cette tendre forteresse de 21
pièces, le bureau et la cuisine font recettes pour déguster la vie.
Sur la table de la cuisine, un plan d'architecte fait office de nappe. Il est
l'heure de déjeuner, les Vavro zappent l'apéritif. Pas de temps à perdre,
Pierrick Lelard a avancé un projet ou plutôt deux projets de restaurants
initiés par Alain et Dominique. C'est pour Jean-Yves Carpentier et
Patrick Mehu (voir
chronique) que le
trio se réunit. Baptise est là. Il rêve de conduire en bateau les futurs
clients du Belles Rives , un resto déjà ancré sur un chemin de halage à
Trévoux. Le fils cadet des Vavro fourmille d'idées lorsque celles-ci ne sont pas
conventionnelles.
C'est certain, Polo des bords de Saône approuvera. L'ami, le voisin,
le Chef qui vient presque chaque matin prendre un café ici, aime cette maison où
règne une atmosphère particulière. Vieux meubles, papiers, revues, peluches,
tableaux plutôt contemporains, objets rares, collections émouvantes de poupées
ou de petites voitures peuplent cet univers baroque et organisé. Un grand
escalier qu'on a envie d'emprunter pour se croire châtelain conduit au bureau.
La joyeuse pagaille qui saute aux yeux est l'assurance vitale qu'il se passe
quelque chose. Nos designers en art de la table ont de quoi s'occuper. Oubliée
l'époque où ils n'avaient qu'une assiette à se mettre sous la dent... Aujourd'hui
ils grignotent l'espace des sites gourmands de Chicago à Bratislava.
En ajoutant de la couleur à leur destin, Paul Bocuse a projeté deux talents sur
la scène des cuisiniers. Recette gagnante qui ne monte pas à la tête d'un couple
moderne accro de passé : cela ne veut pas dire que nous sommes passéistes,
en fait, nous sommes très intéressés par ce qui se passera demain, par les gens
et aussi à ce qui touche à nos racines . Racines slovaques pour Alain,
ardéchoises pour Dominique, qui, en héritant d'un château au pays de ses
racines, renoue avec l'enfance et les cérémonies. Le mariage de Blaise l'année
dernière en est la plus belle illustration.
L'été, à la fraîcheur des pierres et des vignes, Château-Vavro s'ouvre à des
soirées contes et chansons comme au bon vieux temps. Ce sens de la fête juste et
lumineuse se conjugue en toute circonstance. Aussi à l'aise dans une guinguette
qu'un palace, heureux d'apprécier un Couty ou l'uvre d'un sculpteur
inconnu tel Luis Lison de Loma, les Vavro sont tout simplement heureux.
Ils voyagent chez eux et quand ils sont ailleurs Dominique fait suivre son
monde : un grigri nommé boubou pour l'avion, une poupée en plastique noir, des
cartes postales à coller aux murs pour la chambre d'hôtel. Objets fétiches
avez-vous une âme ? Oui répondent en chur les Vavro qui, ô surprise, rêvent
d'une maison transparente comme le verre plantée sur une colline du côté de
Collonges...
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