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19 juin 2006


 Fabien Chalard en pleine ascension
 


Photos © Jean-Luc Mège
 

Par Nadine Fageol

 

En moins de quatre ans, ce jeune trentenaire est passé du statut de cadre parisien overbooké pour s'affirmer comme surprenant créateur de lieux nocturnes. Virage négocié avec passion et force rigueur. 

 

Exception faite que ses établissements, le Comptoir de la Bourse et le Bar, font parler de lui en bien et lui attire des demandes d'association à profusion, à priori il n'y a rien à dire sur Fabien Chalard. Tout simplement parce qu'il ne faut pas sortir de Saint-Cyr pour observer que ce garçon de tout juste 31 ans affiche un caractère déterminé tout en restant d'une correction quasi exemplaire dans un milieu où les patrons caractério-illumino-vulgaires font flores. À le regarder évoluer depuis trois ans, on a pu découvrir un bosseur acharné s'affirmant comme le nouveau créateur de concept de la nuit lyonnaise section bar hype. Michel Barthod longtemps géni de la place a trouvé son successeur, la gestion en plus. Car Chalard, c'est du sérieux plutôt quarante-douze fois qu'une. Point fort, un entourage familial dénué de carence, solide dans l'affection. Selon la volonté parentale, Fabien va à bonne école ; Saint Thomas d'Acquin, prépa HEC aux Chartreux et École de commerce à Paris. Pareillement formaté, il négocie naturellement un stage dans une de ces « world entreprises » pour devenir cadre de haut vol doré sur tranche. Quatre ans passés chez KPMG Consultant et stratégie financière, réorganisation et planification d'entreprise n'ont plus de secret pour lui. La carrière est toute tracée, job hyperactif, du fric, la belle vie parisienne... Seulement le stress ambiant et une indigestion amoureuse le ramènent à ses envies de jeunesse. La restauration, il avait dans l'idée à l'époque de rejoindre l'école hôtelière de Lausanne. Mais le père soucieux du devenir de sa progéniture, évoquant un secteur bouché avait proféré en faveur d'une formation plus solide ! N'empêche qu'à Paris, Fabien commence à fomenter un gros projet avec une amie finalement sans suite.


Loin de céder, l'oiseau Fabien réintègre sa branche lyonnaise et se met à l'affût d'un bar. Son choix s'arrête sur le Café du centre à la queue de cochon dont il raffole du zinc à la cloison en dalles de Saint Just colorées. Petite certes, mais la cible est postée à côté d'une librairie vouée à disparaître tôt ou tard. C'est son père qui déniche son décorateur. Budget trois cent kopeks, Raymond Morel s'adapte, met tout le monde au turbin, Fabien peint les chaises en doré, les murs s'habillent de sémillantes rayures, le tout nouveau Comptoir de la Bourse égaye l'environnement « city lyonnaise » de sa déco baroque Lacroix époque rose-orange. Fabien démarre seul derrière le bar à cocktail déjà côté auprès d'une certaine clientèle branchouille. Puis embauche un, deux, trois garçons, toujours des pointures issues de belles maisons. La formation, ça a du bon. Ce qui devait arriver, arrive ; l'heure du glas sonne pour la librairie attenante. Dans le langage « Tontons Flingeurs », Fabien gloutonne, absorbe, fusionne ! Et appelle à la rescousse Donatella Piana pour l'architecture et Raymond Morel à la décoration. Le grand Comptoir de la Bourse annonce l'ère du nouveau lounging, moins d'épure, plus baroque contemporain, multiplie les différences d'assises et la station debout forcée étant donné le succès ! Côté vivres, Olivier Determe, aussi jeune que créatif, renouvelle un « play-food » tout de fraîcheur distillé dans de fantaisistes contenants, la souri d'agneau dans un aquarium ! Le soir Olivier Gaugey, meilleur jeune barman de France 2003 reprend la main à la tête de la carte de drinks la plus enlevée de la ville. Voilà l'esprit Chalard, rigueur, exigence, recrutement au cordeau pour proposer in fine, le fin du fin.



 

Dans la foulée, il a gobé le Bar d'en face qui, dès 20 heures, brille sous les lasers. Déco pure Morel cette fois dressant un habillage noir et blanc dépourvu de froideur grâce à une profusion d'idées lumineuses, colonnes drapées de fibres optiques ou encore ces vers lumineux au bout de cornes de silicone avec lesquels on adore jouer. Aux manettes, Pierre Bergoen, fidèle parmi les fidèles dans le staff Chalard, à la tête d'une carte de drinks « over déjanted » avec spermatozoïdes en plastique en guise de gobelets plébiscités par une bande de jeunes gens d'ores et déjà aficionados. S'il déclare, « aujourd'hui je ne regrette pas mon choix, je me sens bien à Lyon. Je sais pourquoi je me lève le matin car c'est une chance inouïe que d'être à son compte ». En revanche, il file régulièrement rejoindre ce « Paris où j'ai tout appris », se ressourcer, retrouver ses amis avec toujours un membre de son équipe sous le bras « pour qu'il découvre les lieux que j'aime et la façon dont j'ai envie de travailler ». Dans le même esprit, le jeune chef sera expédié en formation au mois d'août dans un établissement new-yorkais. À l'instar de tous ces gens qui se démènent pour innover, il dit : « Je critique sans arrêt Lyon, que j'aime en définitive sinon je ne serai pas là ». Dans l'immédiat la bougeotte le tenaille, il élague les tentatives d'association, mais ne résiste pas à l'envie de passer à autre chose. Trois sites en repérages très avancés avec la certitude de voir éclore dans l'hiver un lieu hors norme, un petit club intimiste ultra-sélect ce qu'il appelle de fort jolie manière « L'élixir de l'élixir ». En attendant, le jeune homme charismatique à l'accent paternaliste ne craint pas d'affirmer qu'il peut être dur, « pour nous, pour la qualité de notre prestation ». Fiorel de l'Icéo reste d'un excellent conseil, il fréquente Caro, Manoa, Luca du Sapori, Ansanay, Marguin... « des gens plus ou moins jeunes qui comptent pour moi ». Reste qu'au-dedans, Fabien est un ultra sensible d'où cette quête du toujours plus que bien et la savoureuse envie de trouver chaussure à son pied.

 


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A suivre, James Bonddans les roues de Jean-Pierre Goy

 

Fabien Chalard
 

 

 

 

 


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